Depuis la dernière année, j’ai eu à grandir sur nombre de mes immaturités intérieures, et la plus poignante a été d’arriver à dire “non” au risque de décevoir certains de mes proches et amis. Ça n’a pas été facile car pendant longtemps, j’ai été captive des attentes des autres à mon égard. Dire “non”, et donc dire JE, c’était prendre un risque qui touchait à mes insécurités. C’était prendre le risque de décevoir, prendre le risque de l’incompréhension, de l’abandon et de la solitude.
Mais derrière ces risques, il y avait aussi le choix de la liberté intérieure, le choix de l’amour en vérité. Ainsi, c’est la beauté de cette audace, source d’une fécondité merveilleuse que je désire partager.
Étant tous humains et donc intrinsèquement fragiles, se décevoir mutuellement nous guette, et il en faut parfois peu ! Même si cela est souvent douloureux de toute part, il y a bel et bien quelque chose de beau dans ce brisement.
“Tout est grâce jusqu’à l’extrême douleur” – Pierre Lacroix.
À chaque fois qu’on se sent déçu par l’autre ou que l’on déçoit autrui, il faut se souvenir que “l’Amour ne cherche pas son intérêt” ( 1 Cor 13:5). En effet, dire qu’on est déçu d’une personne sous-tend qu’on nourrit des attentes envers elle et parfois, nos attentes peuvent nier son altérité et sa liberté; nier la possibilité qu’elle prenne un chemin différent du nôtre, nier sa liberté de faire ses propres choix quitte à se tromper, etc.
Face à nos attentes déçues, le Seigneur nous appelle à aimer comme Lui, c’est à dire inconditionnellement ! Dans le Christ Jésus, il a en effet livré sa vie “alors que nous étions encore pécheurs” (Rom 5;8) . Dieu élargit notre cœur à la lumière de sa Miséricorde et nous permet d’aimer l’autre en vérité et dans sa vérité. Nous-même sommes purifiés lorsqu’il nous arrive de décevoir autrui. Cela nous délivre de la captivité du regard de l’autre, nous rend libres d’exprimer notre soi !
Dans les deux cas, oser décevoir et accepter d’être déçus est un chemin de sanctification, de sainteté, qui rend chacun davantage à l’image de Dieu, si l’on se laisse regarder et transcender par Dieu. Oser décevoir et être déçus, c’est accueillir l’épreuve de la vérité : accueillir sa vérité et la vérité de l’autre.
Ceci dit, il est intéressant de voir qu’il en va de même dans notre rapport avec Dieu ! Lorsque nous pensons que nous avons déçu Dieu à cause de nos manquements, là également, Dieu se révèle à nous comme le père dans la parabole du fils prodigue. (Luc 15, 11-32)
« Au cœur de nos échecs humains, Dieu garde l’alliance et reste fidèle (…) Dieu ne reprend jamais ses dons. Jamais ! Dieu simplement, poursuit sa quête d’amour, quels que soient nos chemins. Ce qu’il nous a donné alors, il continue de nous le proposer aujourd’hui par un autre chemin » – Georgette Blanquière
Dieu ne rougit pas de nos péchés, mais Il désire dans son infinie Miséricorde nous aider à grandir en sainteté. Il nous donne la possibilité, et j’ose le dire, la permission de nous tromper, de nous éloigner, afin de mieux le retrouver, de mieux le découvrir. Dieu, en nous aimant ainsi, nous invite à ne pas succomber à la peur qui nous empêche de vivre dans son amour, sa vérité et sa liberté. Il nous invite à la confiance ! Confiance dans sa fidélité et son amour. Il nous invite à nous appuyer sur Lui et constamment sur sa Miséricorde, plutôt que sur nous-mêmes. Il nous appelle à le regarder Lui, plutôt qu’à nos péchés.
Également, lorsque nous sommes “déçus” de Dieu parce que les choses ne se passent pas selon notre entendement, Il purifie notre perception de Lui, en nous repositionnant dans la vérité de son être, afin que nous l’aimions mieux, “en Esprit et en Vérité” (Jn 4;24). Oser décevoir et être déçus, c’est oser répondre à l’appel de Dieu au milieu de notre fragilité et de nos blessures. C’est oser s’enivrer de la miséricorde divine, c’est oser Aimer vraiment !
Pour conclure cet article, j’aimerais vous laisser avec cette belle citation de Philippe Ariño qui nous encourage à l’audace de l’Amour :
« Aimer quelqu’un, c’est le rendre autonome, lui laisser son espace de liberté, et lui donner les moyens de nous abandonner pour mieux le retrouver. Comme nous aimons trop l’autre pour le retenir, nous prenons le risque de le perdre. Et ce risque mesuré, c’est l’Amour ».
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Photo par Kayle Kaupanger sur Unsplash