« Sauver la peur, c’est la conduire à sa fin : faire de nous des êtres vivants plus responsables, plus ouverts à Dieu. C’est pourquoi elle nous met en état de combat spirituel. » — Marguerite Léna
Depuis petite, on me considère comme la plus peureuse de ma fratrie. Même si ce qualificatif est souvent rappelé pour me titiller, ce trait de caractère s’est avéré bien utile pour nous éviter de nombreux dangers. Ainsi, la Peur est un sentiment paradoxal : autant elle peut s’avérer utile, autant on préfèrerait ne pas l’éprouver, car elle nous ramène à nos faiblesses. Pour un chrétien d’ailleurs, le fait de ressentir de la peur est parfois le lieu d’un âpre combat intérieur. En effet, nous avons tendance à opposer le sentiment de peur avec la foi. Si l’on a peur, pense-t-on généralement, c’est que l’on manque de confiance en Dieu. Pourtant, non seulement peur, foi et confiance en Dieu peuvent cohabiter, mais en plus, le sentiment de peur peut être un merveilleux chemin de croissance spirituelle.
C’est une leçon que j’ai apprise à la faveur d’un évènement qui m’a quelque peu bouleversée en début d’année. Un enseignement inopiné que j’aimerais partager avec vous aujourd’hui.
« Le courageux n’est pas celui qui est dénué de peur, mais celui qui la ressent, sans toutefois jamais s’identifier à elle » — Père Pascal Ide
Lorsque cet évènement se produisit, mon seul refuge fut le Saint-Sacrement. Ainsi, à la faveur de l’Adoration, le Seigneur attira mon attention sur plusieurs peurs inconscientes qu’Il voulait m’aider à traverser et même à évangéliser à travers cette crise : peur du mal qui rôdait, peur de mes mauvais pressentiments, peur de manquer d’espérance, peur d’avoir peur, etc. Cette pédagogie s’accompagna de paroles de consolation qui furent un doux Baiser pour mon âme, des paroles que je peux traduire ainsi :
« C’est normal que tu sois déboussolée quand ton cœur et ton imagination sont envahies par tes angoisses profondes. Cela peut te donner l’impression de manquer de foi ou d’espérance, mais, aussi déroutant que cela puisse paraître, je te demande de Tout offrir à mon Amour et à mon Regard. Même si c’est difficile et douloureux à vivre, c’est comme ça que tu grandis dans la foi et dans mon Amour, quelles que soient les circonstances ».
Wow ! Comme ces paroles furent renversantes pour moi. En effet, le Seigneur ne m’interdisait pas de ressentir de la peur, Il ne me traitait pas de poltronne ! Bien au contraire, Il me disait avec tendresse qu’Il me comprenait, mais surtout, qu’il fallait que j’accueille ma peur et que je le laisse habiter ce sentiment aux mille visages et aux racines profondes. C’est ensemble que l’on transcenderait la peur et c’est en Lui qu’elle deviendrait féconde !
Je réalisai que contrairement à ce que je pouvais penser, éprouver de la peur n’était pas un désaveu de ma confiance en Dieu, mais un chemin de croissance dans la foi, l’espérance et la charité. Malgré mes peurs, je peux faire le choix de poser des actes de confiance, d’être dans la louange et l’action de grâce jusqu’à l’extrême douleur. C’est d’ailleurs aussi un peu l’essence de ces deux versets de Saint-Paul aux corinthiens : « Moi-même, j’étais auprès de vous dans un état de faiblesse, de crainte, et de grand tremblement. » (1 Cor 2:3) et « C’est parce que nous avons une telle espérance que nous sommes pleins d’assurance. » (2 Cor 3:12).
De plus, cette situation m’a fait comprendre avec un autre regard, le triomphe de l’Amour de Dieu sur le Mal. En effet, j’ai réalisé que même si le Mal semblait rôder autour de moi, le plus important était de ne pas me focaliser sur lui, mais sur l’Amour de Dieu qui est Vainqueur en tout temps. Un Amour dont la victoire au milieu de l’épreuve se révèle déjà par ma purification, ma sanctification et ma croissance dans une relation de plus grande proximité avec Lui.
Je ne sais pas pour vous, mais poser un tel regard sur la peur est libérateur ! Le Christ lui-même, en épousant notre condition, a porté nos peurs et à Gethsémani, en a triomphé superbement en choisissant malgré tout de subir l’épreuve de sa passion et de donner sa vie en sacrifice d’Amour pour nous. Une peur et une angoisse telle, qu’il en transpira des gouttes de sang ! Voilà quel fut son lot.
À travers le témoignage de sa propre angoisse, le Christ nous montre sa proximité, sa solidarité et sa compassion dans ce sentiment si humain. Il est capable de comprendre nos peurs pour l’avoir éprouvée lui-même jusqu’à l’extrême ! Comment nous demanderait-il donc de nier ce que nous ressentons. C’est d’ailleurs à dessein qu’à 365 reprises, la Bible dit : « N’ayez pas peur ! ». Ce n’est ni un appel au refus, ni au déni de notre peur, mais une invitation au dépassement ! Une invitation réaliste sur notre condition humaine, mais stimulée par la promesse de son amour, de sa présence, de sa fidélité qui nous aident à accomplir sa volonté !
Alors aujourd’hui, quelles que soient les angoisses qui peuvent vous agiter, j’aimerais vous assurer que vos peurs ne vous définissent pas. La peur n’est ni bonne ni mauvaise. Elle est surtout, pour vous comme pour moi, une invitation à accueillir notre humanité avec ses vulnérabilités, à les offrir humblement au Seigneur afin de grandir avec Lui dans la connaissance plus profonde de son Mystère d’Amour. Ainsi, nous serons toujours plus fortifiés en Lui. Frères et sœurs, n’ayons pas peur d’avoir peur !
« Mais quand j’ai peur, je mets ma confiance en toi. » — Psaume 56 :4
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Photo par Gift Habeshaw sur Unsplash